dimanche 14 janvier 2018

Nouvel an Amazigh à Bruxelles by Kel Assouf

Nouvel an Amazigh In Brussels by Kel Assouf

Mohand-Akli Haddadou. Professeur de linguistique amazigh, écrivain Les calendriers amazighs

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Mohand-Akli Haddadou. Professeur de linguistique amazigh, écrivain
Les calendriers amazighs
le 12.01.18 | 12h00
Les calendriers amazighs
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Un calendrier n’est pas seulement un moyen de se repérer dans le temps, mais c’est aussi un instrument de travail : il marque les saisons, et donc, le rythme des travaux, il indique les rites coutumiers, les fêtes religieuses et, pour les femmes, le cycle menstruel et l’évolution des grossesses.
Ne nous étonnons donc pas s’il existe en Algérie, plusieurs calendriers : le calendrier agraire, appelé encore calendrier amazigh, qui nous vient de l’antiquité, le calendrier hégirien, legs de l’islamisation, le calendrier grégorien, qui s’est imposé, en raison de son universalité, le calendrier des femmes…
Jusque-là seuls les calendriers grégorien et hégirien étaient officiels, mais depuis quelques jours, le calendrier amazigh l’est devenu aussi. Il faut dire qu’en plus des revendications dont il a été l’objet par les militants de la cause amazighe, le jour de l’an de ce calendrier est fêté dans la plupart des régions du pays.
Anciens calendriers
Avant de parler du calendrier amazigh, actuellement utilisé, il convient de signaler l’existence d’autres computs locaux. En travaillant, en 2002, sur des textes médiévaux berbères, Nico van den Boogert a retrouvé des éléments d’un calendrier jusques-là passés inaperçus. Ce calendrier comporte douze mois, qui portent chacun un nom :
-tayyuret tamzwarut (premier mois ou première lune),
-tayyuret taneggart (dernier mois ou lune),
-yardul, (Van den Boogert ne donne pas le sens ; nous proposons «il est obscur» ; cf. touareg : rdel «être dans l’obscurité de la nuit»)
-sinwa,
-tasra yawzwarut, premier gardiennage du troupeau,
-tasra taneggaret (dernier gardiennage du troupeau),
-awdayaghet yemzwuran (les premiers antilopins)
-awdayaghet yenaggaren (les derniers antilopins)
-awzimet yemzwaren (les premiers petits de la gazelle)
-awzimet yenggaren (les derniers petits de la gazelle)
-ayssi ( cf. ayis «cheval»)
-nim.
On ignore le nombre de jours de l’année, ni le nombre de jours du mois. Les références à la lune ne signifient pas qu’il s’agisse d’un calendrier lunaire : le mot ayur (ou aggour signifie aussi en tamazight, «mois». Les dénominations relevées montrent la liaison du calendrier avec les troupeaux et la nature. Il est important de signaler que les Guanches, les populations autochtones des îles Canaries, que l’on donne comme d’origine berbères, avaient dans leur calendrier un mois qui s’appelait Begnesmet, qu’on a rapproché de awzimet, relevé plus haut.
Ce calendrier avait peut-être une large extension (awzim est également pris comme dénomination chez les Touareg sous la forme awhim ; voir plus bas).

Adaptation du calendrier hégirien
Le calendrier musulman débute le 15 ou 16 juillet 622 de l’ère chrétienne, il prend pour point de départ la migration (en arabe hidjra, d’où le nom de hégirienne pour l’ère musulmane) du Prophète et de ses compagnons, de La Mecque à Médine. L’ère musulmane a été instaurée en 638 sous le règne du calife Omar Ibn Al Khattab. L’année hégirienne est une année lunaire qui compte 354 (bas’ita, année plate) ou 355 jours (kabîsa année remplie), avec, dans un cycle de 30 ans, 11 années de 355 jours et 19 de 354. Chaque mois commence au moment où le croissant de lune est visible. L’année comporte douze mois, selon la prescription coranique (sourate 9, verset 36).
Le verset suivant interdit le mois intercalaire (Nasi’i) par lequel les Arabes rattrapaient le retard accusé par le calendrier lunaire par rapport au soleil. Un décalage de 11 jours entre le calendrier hégirien et le calendrier grégorien fait qu’en 33 ans, les mois et les fêtes musulmanes font le tour de l’année.
Les mois employés dans la tradition maghrébine sont les mêmes que ceux du calendrier hégirien, aussi bien chez les arabophones que chez les berbérophones. Cependant, dans quelques groupes berbérophones, on assiste à une adaptation des noms. Ainsi, par exemple, pour Ouargla, on relève la liste suivante :
-Babyannu (Muh’arram), jar Babyanou d lmulud, «entre Babyannu et le mouloud» (S’afar) -lmulud, «le mouloud ou fête de la nativité du Prophète» (Rabi’ I )
-war isem amizzar «mois anonyme premier» (Rabi’ II)
-war isem aneggaru «mois anonyme dernier» (Djumâd I)
-asgenfu n twessarin «repos des vieilles» (Djumâd II)
-tiwessarin «les vieilles» (Radjab)
-asgenfu n rremd’an «repos avant le Ramadhan» (Sha’bân)
-rremd’an «mois de jeûne» (Ramad’ân)
-tfaska tikh’iht «la petite fête, l’Aïd sghir» (Shawâl)
-jar tfaskiwin «entre les fêtes» (Dhû al qi’da)
-tfaska tameqqrant «la grande fête, l’Aïd El Kébir» (Dhû al hidjdja).
Chez les Touareg aussi, on assiste à une adaptation des mois du calendrier hégirien. Ainsi, au Hoggar :
-tamessedeq «la dîme religieuse, l’Achoura» (S’afar)
-tallit sett’efet «le mois noir» (Rabi’ I )
-tallit ereghet «le mois jaune» (Rabi’ II )
-awhim wa yezzaren «1erfaon de gazelle» awhim wa ilkemen «1erfaon suivant» (Djumâd I)
-sarat «mois de sarat» (Djumâd II)
-ti n tneslamin «mois des religieuses» (Radjab)
-amezzihel «mois d’amezzihel» (Sha’bân)
-az’um «mois de jeûne» (Ramad’ân)
-tasese «mois du boire» (rupture du jeûne) (Shawâl)
-gir muhden «entre les prières» (Dhû al qi’da)
-tafaske «sacrifice religieux» (Dhû al hidjdja).
Les deux grandes fêtes de la tradition musulmane sont l’Aïd El Fitr, qui rompt le jeûne de ramadan et l’Aïd El Adha, ou fête du sacrifice d’Abraham. En plus de ces fêtes, les Maghrébins fêtent l’Achoura et la naissance du Prophète (voir Aïd El Fitr, Aïd El Adha, Achoura et Mouloud.

Le calendrier des femmes
Un type de comput est propre aux femmes, notamment pour déterminer les phases de la grossesse. Un calendrier est lunaire et reprend des dénominations du calendrier hégirien, qu’il s’agisse de mois ou de fêtes. L’énumération des mois commence dès que la grossesse est constatée. Voici un exemple que nous avons relevé en Kabylie.
-rdjeb, mois de radjab
-cha’ban, mois de cha’ban
-remdhan, mois du jeûne de Ramadhan
-l’aid tamezyant, «petite fête» (Aïd El Adha ou Aïd Sghrir)
-win ger la’yudat «celui qui est entre les deux fêtes»
-l’aid tamuqrant «la grande fête» (Aïd El Adha ou fête du sacrifice)
-ta’acurt, Achoura
-win deffir n ta’churt ou arbib n ta’churt «celui qui est derrière l’Achoura» ou le beau-fils de l’Achoura
-lmulud «Mouloud», mawlid, fête de la nativité du Prophète
-win deffir n lmulud, «celui qui vient derrière le Mouloud» ou «le beau-fils de Mouloud»
-war-isem «sans-nom» ou «mois anonyme»
-Yemma Ɛcca «mère Aïcha» (femme du Prophète ?)
Le calendrier agraire ou calendrier amazighe
Ce calendrier se retrouve aussi bien chez les berbérophones que les arabophones. Il provient du calendrier romain, ou plutôt, il emprunte ses mois à ce calendrier, sans toutefois emprunter ni ses festivités ni ses rites. Ce calendrier, comme on sait, a été établi par établi en 45 avant JC sous le règne de l’empereur Jules César dont il porte le nom.
Ce calendrier, adopté dans l’Empire romain, duquel relevait la Maghreb, accusait du retard. Dès l’an 7 de l’ère chrétienne, on ajusta le calendrier et, en même temps, on ramena le début de l’année du 1er mars au 1er janvier. Mais le calendrier a continué à accuser du retard, si bien qu’en 326, l’Eglise chrétienne le corrigea de nouveau. En dépit des réajustements, le calendrier accusait, au XVIe siècle, un retard de dix jours sur le temps réel. Le pape Grégoire XIII le réforma alors, en ajoutant10 jours : c’est ainsi qu’on passa du jeudi 4 octobre 1582 au vendredi 15 octobre. Le calendrier julien, employé au Maghreb durant la période romaine, a été remplacé, officiellement, avec l’islamisation, par le calendrier hégirien.
Mais si dans les villes, c’est ce calendrier qui s’est imposé, dans les campagnes et dans les milieux populaires, on a continué à utiliser le calendrier julien, plus propice aux rythmes des saisons et des travaux agricoles. Cependant, comme le Maghreb s’est détaché de l’influence européenne, on n’a pas tenu compte de la réforme grégorienne, c’est pourquoi le calendrier commence, chez nous, le 12 janvier, mais en réalité l’écart de 1582 à nos jours n’est pas de 2 jours mais de 3, car il y a un retard d’un jour tous les 128 ans ou de 3 jours tous les 400 ans, en supprimant trois jours bissextiles. Yannayer devrait donc être fêté le 14 janvier ! D’ailleurs, au Maroc le jour de l’an se fête le 13 et en Tunisie le 14 janvier.
Les mois du calendrier amazigh sont tous empruntés au latin. Nous donnons, ci-après les dénominations en kabyle, en chleuh, en touareg et en arabe dialectal :
-Janvier : Yannayer, Nnayer (kabyle), Ennayer (Maroc central), Innayer (Chleuh), Innar (Touareg) ; arabe dialectal : Yeneyar, Yannayar (latin, januaris mens, mois de Janus).
Février : Furar (kabyle), Febrayer (Maroc central), Khubrayer (Chleuh), Forar (touareg) ; arabe dialectal : Frayer (latin, fébruarius mens, mois de la purification).
-Mars : Meghres (kabyle), Mars (Maroc central, Chleuh, touareg) ; arabe dialectal : Mars (latin, Mars, mois du dieu Mars).
-Avril : Yebrir, Brir (kabyle), Ibril (Maroc central), Ibrir (Chleuh), Ibri (touareg) ; arabe dialectal : Abril (latin, Aprilis mens).
-Mai : Mayyu, Maggu (kabyle), Mayyu (Maroc central), Mayyu (Chleuh), Mayo (touareg) ; arabe dialectal : Mayyuh (latin, Maïus, mois de la déesse Maïa).
-Juin : Yunyu, Yulyu (kabyle), Yunyu (Maroc central), Yulyu (Chleuh), Yunioh (touareg) ; arabe dialectal : Yunyoh (latin, Junius, mois de Junon).
-Juillet : Yulyuz (kabyle), Yulyuz(Maroc central), Yulyuz (Chleuh), Yulyez (touareg) ; arabe dialectal : Yulyuh (latin, Julius, mois de Jules César).
Août : Ghucht (kabyle, Maroc central, Chleuh), Ghuchet (touareg) ; arabe dialectal : Ghucht (latin, Augustus, mois d’Auguste).
-Septembre : Chtember (kabyle), Chutanbir (Maroc central, Chleuh), Chetember (touareg) ; arabe dialectal : Chtember (latin, september, de septem «sept» parce que 7e mois de l’année julienne qui commençait en mars).
-Octobre : Tuber, Ktober (kabyle), Ktuber(Maroc central, Chleuh), Tuber (touareg) ; arabe dialectal : Ktuber, Aktuber (latin, October, de octo, 8e mois).
-Novembre : Nwamber, Wamber (kabyle) Ennwamber (Maroc central, Chleuh), Wanber (touareg) ; arabe dialectal : Nunember (latin, November, de novem, 9e mois).
-Décembre : Djember, Dudjember (kabyle), Dujambir (Maroc central, Chleuh), Dejamber (touareg) ; arabe dialectal : Djanber (latin, November, de novem, 9e mois).
Comme indiqué plus haut, si les dénominations du calendrier sont redevables au latin, ni les fêtes ni les rites ne sont empruntés. C’est ainsi qu’on ne retrouve pas la division en calendes (premier jour du mois au cours duquel on fixe les fêtes religieuses), en ides (la moitié du mois) et nones (8e jour précédant les ides). De plus, il n’y a, dans le calendrier amazigh, aucune référence au paganisme. Tous les rites sont en rapport avec les travaux de la terre et la fertilité, chaque mois, chaque saison correspondant à une activité agricole.
Marceau Gast a parlé, à propos des Touareg de l’Ahaggar d’un calendrier de la faim, c’est-à-dire d’une division de l’année en fonction des disponibilités des ressources alimentaires ou de leur restriction.
Ainsi, Tafsit, le printemps, est l’époque de la floraison et des récoltes de l’orge et du blé, c’est donc une période faste, Ewilen, l’été, est la saison chaude où l’on peut mourir de soif dans le désert, Awelan, l’automne, est l’époque de la récolte des dattes, du mil et du sorgho, c’est une période d’abondance. Tadjrest, l’hiver, est la saison froide durant laquelle la sève ne monte plus dans les végétaux où la nourriture se fait rare.
En Kabylie, des périodes on distingue aussi des périodes, en rapport avec les saisons, la nature ou les travaux : ainsi timgharine, période de froid vif, en furar, tafsut, le printemps, à la fin de furar, aheyyan, période de pluies néfastes en meghres, nnisan, pluies bénéfiques en yebrir, l’aïnsra, fumigation des arbres fruitiers en yunyu etc. Le 17 ktuber, correspondant au 28 octobre grégorien est le premier jour des labours…
L’ère amazighe
Le calendrier amazigh est un calendrier perpétuel, sans millésime. C’est seulement à la fin des années 1970 que l’Académie berbère qu’on a proposé de lui donner une date : on le fait commencer à partir de 950 avant J-C., date d’une bataille livrée par Shershonq I, fondateur de la XXIIe dynastie égyptienne, d’origine berbère.
L’année en cours est ainsi datée : 2968. Le choix de ce millésime est surtout symbolique puisqu’il s’agissait de choisir, dans la longue histoire des Amazighs, un fait marquant qui rappelait à la fois leur puissance et leur influence sur l’une des plus grandes civilisations de l’époque.
http://www.elwatan.com/…/les-calendriers-amazighs-12-01-201
Salem Chaker au sujet de "Yennayer"...
samedi 13 janvier 2018
par Masin

Autour de Yennayer.
Ansi i d-nekka, sani nteddu ?


Je n’aime pas les symboles ! Surtout en politique.
Ils font partie de ces instruments d’aveuglement, d’abêtissement des peuples, qui permettent à des hommes politiques cyniques et opportunistes de conduire les foules comme on conduit les troupeaux de moutons – nehhren-ten am lmal agugam, dit-on en kabyle. Les symboles, dans la vie politique, sont avant tout un outil d’occultation du réel, de dilution de l’esprit critique ; ils servent essentiellement à empêcher l’analyse objective des faits et situations. Ils participent de "l’opium du peuple"… C’est pour cela que tant de leaders politiques, tant de dictateurs ou apprentis dictateurs en usent et abusent. Sur le plan de l’analyse du discours, je pense même que l’on peut formuler une loi selon laquelle le niveau de démocratie d’un pays est inversement proportionnel à l’usage des symboles que font ses dirigeants.
Au cours des différents mandats du Président Bouteflika, les Berbères auront été rassasiés de symboles : tamazight "langue nationale" en 2002, "langue officielle " en 2016, Yennayer journée chômée et payée en 2017… Et la liste n’est certainement pas close. On pourrait d’ailleurs rajouter bien d’autres initiatives si l’on rentrait dans les ‘détails’, notamment les nombreux colloques et autres manifestations publiques organisées sous l’égide des institutions officielles. On peut s’attendre à tout, même à ce que le Président Bouteflika prononce un discours en langue berbère… Quant à Mouloud Mammeri, on ne peut exclure qu’il ait bientôt sa statue à côté de celle de l’Émir Abdelkader, dans le grand et accueillant panthéon de la Nation algérienne, où on retrouvera aussi Saint Augustin, Aït-Ahmed – qu’ils ont exilé –, Boudiaf – qu’ils ont assassiné... Qui se souvient encore du temps où Mammeri était traité comme un paria et qualifié de "chacal" par ceux-là mêmes qui lui tressent maintenant des couronnes ?
Manifestement l’État algérien et certaines élites algériennes se complaisent dans le symbole, l’affichage et la représentation.
Or, ce sont autant de mesures et d’actions qui ne changent strictement rien à la situation réelle de tamazight, langue et culture minoritaires et minorées, toujours soumises au rouleau compresseur de l’arabo-islamisme, de l’arabisation, et de la pensée unique, véhiculés par toutes les institutions de l’État, tout particulièrement par le système éducatif.
L’officialisation de Yennayer est typiquement une mesure "qui ne coûte pas cher et peut rapporter gros" : en caressant dans le sens du poil des élites (berbères et autres) qui ne demandent et n’attendent que la "reconnaissance" du Maître, en accordant quelques os à ronger à des relais toujours prêts à servir le Pouvoir, on annihile, ou au moins on affaiblit, les capacités de résistance, de réaction et de gestion autonome de la société. 
Bref, il s’agit de transformer – en Algérie comme au Maroc – le lion berbère en doux agneau bêlant qui attend la caresse du Maître.
A s-rẓen acciwen, a s-kksen accaren d wuglan…
L’Académie de langue tamazight dont la création est annoncée depuis la révision constitutionnelle de février 2016 appartient à la même veine et aura sans doute la même fonction.
Certes, il faut attendre de voir la forme et le contenu qu’elle prendra avant d’émettre un avis définitif. Mais, au vu des expériences passées et du contexte global, on peut craindre que ce soit encore une mesure dont la finalité principale sera de reprendre, ou d’essayer de reprendre, le contrôle d’un champ qui a longtemps échappé, et échappe encore très largement, à l’État.
Pendant de nombreuses décennies, toutes les actions qui relèvent habituellement d’une académie de langue ou d’institutions de ce type – la codification, l’aménagement…–, ont été assumées, en dehors de l’État, par des universitaires, des écrivains, des associations… Le "passage à l’écrit", notamment, a été l’œuvre d’acteurs non-institutionnels, du pionnier Boulifa à Mammeri, en passant par la myriade d’auteurs, d’éditeurs, de pédagogues, d’universitaires, moins connus, qui ont longtemps travaillé dans la discrétion, voire la clandestinité et l’exil...
Depuis l’institutionnalisation de tamazight, on peut constater que l’État algérien n’a pas pu faire table rase de ce travail souterrain qui s’est fait en-dehors de lui. Jusqu’à présent, même si des ‘voix autorisées’ s’expriment très régulièrement en ce sens, on n’a pas osé s’y attaquer frontalement, et remettre en cause ce socle d’acquis ; il a même été largement intégré par l’Institution (graphie latine, codification graphique, néologie…), grâce à l’engagement têtu des militants berbères, dans et hors l’Institution.
On peut craindre que la future académie ne soit "le cheval de Troie" que l’on utilisera pour, sinon réduire à néant – ce sera difficile ! –, du moins contrer et ralentir une dynamique socio-culturelle autonome.
Sur ce plan, comme sur bien d’autres d’ailleurs, il est toujours très éclairant de comparer la situation de l’Algérie avec celle du Maroc : dans ce pays, le mouvement berbère est à la fois beaucoup plus récent et plus faible – idéologiquement, politiquement…– qu’en Algérie ; et surtout il était et reste sans véritable assise populaire et sans ancrage dans le monde rural, à quelques rares exceptions près. Il s’agit essentiellement d’un mouvement culturaliste d’élites berbères urbanisées, sans relais dans la société profonde, et totalement intégrées aux courants idéologiques et politiques nationaux (nationaliste, socialiste, communiste…) – dont la nature oppositionnelle et critique n’est plus qu’un lointain souvenir. 
En conséquence, lorsqu’elle a décidé de l’institutionnalisation de tamazight, la monarchie marocaine n’a eu aucune peine à imposer ses hommes et ses orientations à travers des institutions parfaitement contrôlées, qui sont là pour mettre en œuvre la politique décidée par le Palais. D’où, entre autres les "néo-tifinagh", alors que le monde associatif penchait clairement pour le latin, "l’amazighe marocain standard" et autres options qui constituaient un sabordage ab initio et ont mené "l’amazighe marocain" dans une voie de garage et l’échec – échec publiquement reconnu par les responsables les plus autorisés, notamment le Recteur de l’Ircam…
C’est sans doute le "modèle marocain" que voudraient importer et imposer les autorités algériennes : une Académie docile, relais zélé des choix du Pouvoir politique, qui permettront à celui-ci de reprendre le contrôle du champ – du moins l’espère-t-il. Et il est sûr que le Pouvoir trouvera toujours des exécutants empressés à occuper des postes de prestige, bien rémunérés, qui se chargeront de diffuser la « bonne parole » ; et d’intégrer tamazight dans le cadre des « valeurs nationales » et surtout de l’enliser – alors que tamazight se portait très bien sans eux.
Bien entendu je n’ai pas été contacté à propos de cette Académie. Et je serais assez surpris que je le sois. Il n’est pas dans les pratiques des autorités algériennes de faire appel aux esprits indépendants et critiques. On préfère habituellement les échines souples et, surtout l’adhésion aux "constantes de la Nation", c’est-à-dire à tout le corpus idéologique qui permet à une oligarchie de maintenir son contrôle sur la société et l’État depuis 1962 : arabo-islamisme, autoritarisme, pensée unique… J’en suis trop éloigné pour qu’on me sollicite.
Et si je me trompe, je ferai un mea culpa public ! Mais je sais que je ne prends pas beaucoup de risque en prenant cet engagement.
Dans l’absolu, pour que cette académie soit efficace et acceptée par les acteurs du terrain berbère, il faudrait au minimum : a) qu’elle soit statutairement indépendante des injonctions politiques ; b) qu’elle soit composée de personnalités dont l’engagement, l’action et/ou la production scientifique et culturelle berbérisante soient incontestables ; c) qu’elle reflète un équilibre entre spécialistes universitaires et producteurs culturels reconnus ; d) enfin, qu’elle soit ouverte sur le monde berbère non-algérien, car tamazight et l’amazighité ne concernent pas que l’Algérie et il serait aberrant, aux plans scientifique, historique et politique, de les enfermer strictement dans les frontières d’un État : "l’amazighe algérien" n’a pas plus de réalité et de consistance que "l’amazighe marocain"… C’est ce qu’ont bien compris les militants et acteurs de la langue berbère depuis les années 1940 en plaçant délibérément le travail d’aménagement de leurs variétés régionales de langue dans une perspective "berbère".
Sur l’institutionnalisation de Tamazight en Algérie, je serai plus nuancé.
Car, bien sûr, il y a du positif dans toute cette évolution qui commence en 1990 et résulte essentiellement, rappelons-le, de la dynamique et de la pression sociale et non du "bon vouloir du Pouvoir". Tamazight n’est plus frappée d’ostracisme et n’est plus objet d’une répression systématique. Souvenons-nous que dans l’Algérie indépendante, des jeunes gens sont allés en prison pour la seule détention d’écrits en tifinagh, ou pour avoir réclamé son enseignement…
En même temps, il est clair que nous sommes encore très loin des conditions qui assureraient à la langue et à la culture berbères un plein épanouissement et la garantie de leur survie. Un enseignement, facultatif, de trois heures hebdomadaires, dont la continuité n’est pas toujours assurée dans le cycle scolaire, et qui est loin d’être généralisé même dans les régions berbérophones, n’est certainement pas une configuration qui permettra la consolidation d’une langue à large échelle, surtout quand il s’agit d’une langue minoritaire, historiquement dévalorisée et longtemps confinée dans l’oralité et la ruralité. 
Nous sommes en réalité encore dans des mesures "cosmétiques" : si l’on veut que le berbère puisse résister et se développer face à la pression permanente de l’arabe (classique et dialectal), du français, omniprésente dans le quotidien comme dans les sphères d’usages "élaborés" (Justice, Administration, Sciences et Technologies, Economie…), cela suppose des mesures lourdes, au minimum un enseignement bilingue généralisé dans les régions berbérophones. L’exemple parfaitement documenté d’autres langues minoritaires (catalan, basque, breton, corse…) est là pour nous rappeler que face au rouleau compresseur des "grandes langues dominantes", nos "petites langues" ne peuvent trouver leur salut que dans des mesures de "protectionnisme linguistique" assez radicales. Sinon, on en reste au symbole, au mieux à la conservation patrimoniale et muséographique. Tous les linguistes et sociolinguistes sérieux sont d’accord sur ce point.
Sur la question de la notation usuelle de la langue que certains soulèvent de manière récurrente depuis au moins 40 ans, je suis catégorique : c’est un prétexte, une arme brandie par tous ceux qui ne supportent pas que tamazight ait connu un développement autonome, hors de l’Etat et du giron arabo-islamique… Comme si le Berbère et tamazight n’avaient droit d’exister et ne pouvaient être tolérés qu’habillés du costume arabo-islamique. Non seulement, ils ont bloqué, interdit pendant des décennies toute action, y compris scientifique, en faveur du berbère, mais ils voudraient imposer des choix graphiques qui seraient une rupture totale avec plus d’un siècle de pratiques et un capital documentaire et scientifique considérable. 
Contrairement à ce que voudraient imposer les tenants d’une conception bureaucratique et étatiste de la langue, c’est d’abord l’usage qui fait la langue. L’essentiel de la production littéraire, des publications, en Algérie comme au Maroc d’ailleurs, est en caractère latins. La quasi-totalité de la production scientifique est en caractères latins. Tout le travail de codification graphique, depuis plus de 50 ans, a été réalisé sur la base de la graphie latine.
Contester et vouloir revenir sur cette option serait vouloir porter un mauvais coup au berbère, pour des motifs purement idéologiques : on ne veut/peut pas tolérer qu’une "langue nationale algérienne" puisse s’écrire autrement qu’en caractères arabes. 
Cela révèle bien la pensée profonde des milieux du Pouvoir et l’esprit sous-jacent à tous les simulacres de "reconnaissance" – esprit du reste parfaitement explicite dans le préambule de la Constitution algérienne : "l’Algérie est d’abord une terre arabe" et pour avoir le droit d’exister, le Berbère doit reconnaître qu’il appartient à la famille arabo-musulmane.
Depuis l’origine – cf. les Chartes de Tripoli, d’Alger, les Chartes nationales, les préambules des constitutions …–, ces élites étatiques algériennes n’arrivent à admettre qu’il n’est pas du ressors de l’État de définir une "identité nationale", "la personnalité algérienne", réalité historique fluide, multiple et complexe et en constant devenir. On retrouve en cela un trait clairement fascisant de "l’idéologie arabe contemporaine", reprise par tous les nationalismes arabes (et l’islamisme, son frère cadet), qui est la matrice idéologique première du nationalisme maghrébin.
Pour ma part je ne prétends interdire à quiconque d’utiliser l’alphabet de son choix : que les tenants de la graphie arabe se mettent au travail et produisent !... Et laissons faire le jeu de la libre concurrence. Mais ils savent par avance quel serait le résultat : c’est bien pour cela qu’ils voudraient imposer un choix institutionnel, par le haut, en s’appuyant sur l’autorité de l’État, d’une ‘Académie’… Sur le fait du Prince.
Je les invite aussi à méditer l’exemple du Maroc : l’Institut Royal de la Culture Amazighe a opté en 2003 pour la graphie en néo-tifinagh : 15 ans plus tard, l’écrasante majorité des écrivains berbères – Rifains, Chleuhs ou Amazighs du Maroc central –, publient leurs œuvres en caractères latins, une très petite minorité en alphabet arabe. Et les publications officielles en néo-tifinagh ne sortent pas du cadre scolaire et des rayons des entrepôts de l’IRCAM. À l’Université, tous les Départements de Langue et Culture Amazighes du Maroc, malgré l’option officielle, utilisent la graphie latine. Le pouvoir de l’institution ne peut pas grand-chose contre l’usage, la légitimité et la dynamique sociales et historiques, qui, en la matière, sont du coté de la graphie latine.
Sur l’avenir de Tamazight et des Berbères.
Je ne crois pas que tamazight et l’Amazighité puissent s’épanouir et même survivre dans le cadre d’un État centralisé qui se définit, historiquement, idéologiquement, constitutionnellement…, comme arabo-musulman. Comme je l’ai dit et écrit à plusieurs reprises, dans un tel cadre, le berbère est condamné à la disparition, au mieux à la conservation patrimoniale et muséographique.
La seule possibilité pour que le berbère survive et que les Berbères puissent exister durablement en tant qu’entités ethnolinguistiques spécifiques et que le droit à leur identité et à leur langue soient expressément garantis par un ensemble de protections politico-juridiques. Concrètement, cela s’appelle l’autonomie, le fédéralisme… Même si, bien sûr, il ne m’appartient pas d’en définir les formes exactes car je ne vis pas en Algérie depuis longtemps, cela implique au minimum que les régions berbérophones aient la totale maîtrise de leur système éducatif, de leur vie et environnement culturel. Sachant qu’une langue et une culture n’existent, ne survivent et ne se développent que portées par une communauté humaine stabilisée, il faut nécessairement que celle-ci ait aussi les moyens économiques, institutionnels, de sa survie…
Là-dessus, je suis parfaitement clair depuis [1] au moins 1995 : dans le cadre des États-nations maghrébins tels qu’ils ont été définis au XXe siècle, les Berbères/le berbère sont condamnés à la régression et une lente disparition par "dilution dans le creuset arabo-islamique"… Le processus historique et sociologique d’arabisation se poursuivra inexorablement, et s’achèvera, du fait de l’effondrement des sociétés traditionnelles qui portaient cette langue et cette culture, de l’exode rural, de l’intégration dans le contexte national et international qui imposent d’autres langues et d’autres références. Comme je le dis souvent à mes étudiants, tous nos grands-parents, voire nos parents, étaient strictement monolingues, combien d’entre nous le sont encore, et combien transmettront la langue à leurs enfants ? Au mieux, on préservera quelques grands monuments littéraires (Si Mohand…) et quelques belles statues et stèles dans les musées.
Comme je vis en Provence, je rappellerai que Frédéric Mistral, le grand écrivain provençal, a obtenu le Prix Nobel de littérature en 1904. – Que reste-t-il de l’occitan et du provençal en particulier ? Un certain folklore et un accent…
Sauf à continuer à prendre des vessies pour des lanternes, les Berbères, s’ils veulent survivre, dans un environnement qui leur est radicalement défavorable, doivent s’en donner les moyens et ceux-ci sont nécessairement politiques et impliquent la remise en cause des fondements des États-nations dans lesquels ils sont intégrés.
Salem CHAKER,
Marseille, le 12/01/2018.

Notes

[1Ma première interview, donnée à Arezki Aït-Larbi pour le journal Liberté du 21-22 février 1995, où j’ai pris explicitement position pour l’autonomie linguistique et culturelle de la Kabylie
http://tamazgha.fr/Salem-Chaker-au-sujet-de-Yennayer.html
mardi 9 janvier 2018

Le vent du désert souffle dans la musique d'Imarhan

5 minutes
"Temet" fait suite à leur premier album éponyme "Imarhan" qui avait convaincu aussi bien la presse française et internationale, que les musiciens d'horizons tout à fait divers tels que Usher, Steve Shelley, Kurt Vile ou encore Howe Gelb.
Le nouvel album d'Imarhan, "Temet", sortira le 23 février 2018 (ici, un extrait de la pochette de disque)
Le nouvel album d'Imarhan, "Temet", sortira le 23 février 2018 (ici, un extrait de la pochette de disque)
Les cinq membres d'Imarhan  sont originaires de Tamanrasset et ils ont fait danser le public du monde entier ces deux dernières années, aux Etats-Unis, en Europe ou en Chine.     
Cette rencontre avec le public occidental a eu une influence majeure sur "Temet" le nouvel album d'Imarhan.
Les guitares de Kel Assouf sont maintenant enrichies de rythmiques funky, de beats disco et de guitares rock, jusqu'à nous emmener sur une piste de danse saharienne. 
L'équipe
  • Thierry Dupin
  • https://www.franceinter.fr/emissions/dans-la-playlist-de-france-inter/dans-la-playlist-de-france-inter-09-janvier-2018Programmateur musical
MAURITANIE

Chinguetti, la sagesse du sable

Par Jérémie Vaudaux, pour A/R —  (mis à jour le )
Chinguetti, la sagesse du sable
Chinguetti, la sagesse du sable Photos Jérémie Vaudaux

«Capitale spirituelle de la Mauritanie», «Septième ville sainte de l’Islam», «Sorbonne du désert»… Chinguetti collectionne les appellations et... les montagnes de sable qui menacent son existence même.

Chinguetti est généreuse. À celui qui déambule entre les murs ocre, les enfants et les quelques chèvres qui dévorent des débris de sacs de plastique, elle offre son sable. Les chaussures frôlent l’indigestion et, sitôt vidées, les voilà de nouveau pleines. C’est qu’elle en a à revendre du sable Chinguetti tout comme ses voisines, les cités fortifiées (ksars) de Tichitt, Oualata et Ouadane, fondées aux XIe et XIIe siècles et classées elles aussi au patrimoine mondial de l’UNESCO. Quatre cités menacées par les tendances expansionnistes de l’erg Ouarane, le plus grand ensemble dunaire de Mauritanie (1000 km²).
Chinguetti, c’est la promesse d’une aventure. C’est l’erg qui nous fait de l’œil à quelques centaines de mètres du minaret coiffé de ses cinq œufs d’autruche. C’est des hommes en bleus accroupis contre les murs de torchis qui nous observent nonchalamment. C’est aussi les femmes drapées dans leur melahfa, un grand voile (quatre mètres environ) de tissu aux couleurs vives. Le désert est donc habité. Et il fait du bruit. Et il est coloré. Et il a des objets d’artisanat en stock, quantité de bijoux et babioles qui se sont accumulés alors que l’économie locale s’effondrait à partir 2009 avec le départ des tour-opérateurs.

Passé glorieux, présent incertain

Derrière les murs de pierres de la bibliothèque appartenant à Seif Islam, des centaines d’ouvrages d’une rareté inestimable sommeillent, conservés depuis des siècles par la sécheresse ambiante et les bons soins prodigués par la famille de Seif Islam, les Al Ahmed Mahmoud. «On continue à se débrouiller avec les moyens du bord. Ce n’est pas l’idéal, mais on le fait avec amour, par devoir aussi », confie Seif, descendant d’une famille de cadis, la caste mauritanienne des érudits.
Au début du siècle, le ksar comptait une trentaine de bibliothèques. Aujourd’hui en comptant celle de la famille Al Ahmed Mahmoud, elles ne sont plus que cinq. Cinq pour sept mille livres. Autant de trésors à protéger contre le temps qui passe, la chaleur desséchante et le travail d’usure du sable. Seif Islam est un résistant dont la voix veloutée masque une volonté d’acier. Il enfile ses gants, feuillette un coran en peau de gazelle, récite quelques sourates, puis se lance, exalté, dans un récit sur la grandeur passée de Chinguetti. Loue le rayonnement de sa zaouïa, sa confrérie religieuse désormais détruite, sa medersa, son école coranique toujours sur pied, ses dix-sept mosquées… Regrette le temps où passaient des caravanes de 20 000 dromadaires… Déplore les promesses d’aide à la conservation non tenues par l’UNESCO et la menace permanente d’ensablement.

Coups de pelle et du destin

Contre les dunes, les habitants résistent. À coups de pelle, beaucoup. À coup de subventions, aussi. Moins. Pas assez. La dernière date de 2003. «Le cadeau de l’Europe ? Des pelles et quelques brouettes», ironise Meriem, une habitante qui me poursuit à travers la ville dans l’espoir de me refiler quelque babiole.
On distingue, derrière les couleurs de sa melahfa et la colère de ses gestes effrénés des traces de pinceau rouge sur les murs, marques de l’ancien niveau du sable, situées à trois mètres au-dessus du sol aujourd’hui sillonné par les jouets en ferraille des enfants. «Certaines maisons avaient été complètement submergées, se souvient Meriem, qui de commerçante se transforme subitement en historienne. Tout le monde s’était mobilisé pour sauver la ville. Ça tiendra jusqu’à la prochaine fois…»
Méditant ses paroles je remonte vers notre auberge. Le soleil se couche sur Chinguetti avec un goût de «dernière fois». Dernière ampoule électrique avant une semaine, dernier minaret, dernière nuit en intérieur, dernier robinet… Demain, nous troquerons les murs du ksar contre les rondeurs des dunes, en compagnie de notre guide et de l’équipe de chameliers. Direction l’erg Ouarane. Rien ne peut m’arriver, car Meriem a réussi sa mission: je repars de Chinguetti avec un chapelet qui me protégera contre les djinns du désert.
A suivre…
Reportage réalisé pour le magazine A/R à l’occasion d’un voyage organisé par Allibert Trekking
Jérémie Vaudaux pour A/R
http://www.liberation.fr/voyages/2018/01/11/chinguetti-la-sagesse-du-sable_1621667