mardi 20 mai 2014


Attaque de Benghazi : lutte contre les islamistes ou tentative de coup d’État ?

 
Le calme est revenu lundi matin à Benghazi, dans l’est de la Libye, après trois jours de violents combats. Vendredi, un général à la retraite avait lancé une attaque pour déloger les milices islamistes accusées de semer la terreur dans la ville. Mais les habitants s’interrogent sur ses réelles intentions.
 
Ces forces, qui se font appeler "Armée nationale", ont bombardé le quartier général Ansar al-Charia à Benghazi et la brigade du "17 février". Ces brigades islamistes, parmi les plus puissantes de Benghazi, ont riposté, notamment avec des tirs de canon.
 
Au moins 79 personnes ont été tuées et 141 autres blessées dans les affrontements, a indiqué le ministère de la Santé.
 
Ce blindé ferait partie du "butin" répcupéré par Ansar al-Charia après les combats.
 
L’attaque a été menée par Khalifa Haftar, un ancien général qui a combattu dans les rangs des révolutionnaires en 2011, et ses troupes, constituées essentiellement de militaires qui ont fait défection. Ils entendent "nettoyer" la ville des milices islamistes, nombreuses dans la ville. L’armée a de son côté démenti toute implication dans les affrontements et dénoncé l’action de l’ancien général.
 
Ancien soutien de Kadhafi, Khalifa Haftar jusqu'à la fin des années 1980, il a passé près de 20 ans aux États-Unis avant de rentrer pour participer à la rébellion de 2011.   

"Si, comme on le soupçonne, il commet un coup d’État, c’est un vrai retour en arrière"

Sami Berriwen est un habitant de Benghazi. Il est stagiaire au ministère des Affaires étrangères.
  
Les habitants ont été relativement épargnés par les combats car ils ont eu lieu à la périphérie de la ville, notamment à l’entrée est, où se trouve le quartier général de la milice Ansar al-Charia. L’attaque visait aussi la brigade du "17 février", à l’ouest. Également considérée comme une brigade extrémiste, elle est néanmoins rattachée à l’état major de l’armée.
 
Dans une interview télévisée en février dernier, le général Haftar déclarait qu'il fallait "suspendre" les activités du Congrès national, car il n’avait pas tenu sa promesse de lutter contre les groupes intégristes armés et de ramener la sécurité, notamment à Benghazi. 
  
"Photos de véhicules appartenant aux troupes de Haftar, détruites par les moudjahidine." 
  
Cette déclaration a été considérée comme une tentative de coup d’État de la part des autorités de Tripoli, qui le soupçonnent de vouloir accaparer le pouvoir en Libye.
 
Le général à la retraite, qui bénéficie du soutien de beaucoup de militaires, même si son action n'est pas reconnue par les autorités, a mené son attaque à partir du camp al-Rajma, proche de l’aéroport. Il a lancé des raids avec des hélicoptères et avions de chasse avant de lancer l’attaque au sol avec plus d’une centaine de véhicules.
Une large partie des habitants de Benghazi soupçonne les milices islamistes, et surtout Ansar al-Charia, d’être responsables des assassinats qui visent quasi-quotidiennement la police et l’armée à Benghazi.
 
Si l’armée libyenne régulière avait mené cette attaque contre les intégristes à Benghazi, je l’aurais applaudi, mais ce n’est pas le cas. En ce qui concerne Haftar, il n’est pas légitime et si, comme on le soupçonne, il commet un coup d’État, ce sera un retour en arrière, et le passage à la démocratie en Libye sera renvoyé aux calendes grecques. De plus, je ne pense pas qu’il puisse avoir le dessus sur les milices islamistes car les forces en place sont équilibrées, les combats risquent donc de durer une éternité.
 
La meilleure solution serait que le général Hafta, les milices islamistes Ansar al-Charia et le "17 février", et le Congrès national s’assoient autour d’une table et négocient une solution pacifique.

"Beaucoup ici soutiennent cet ancien général parce qu’ils en ont assez de l’insécurité et des attentats quotidiens"

Ahlam El Badri est blogueuse à Benghazi.
  
La population de Benghazi veut des mesures sérieuses pour être débarrassée des intégristes. Beaucoup ici soutiennent cet ancien général parce qu’ils en ont assez de l’insécurité et des attentats quotidiens. C’est le congrès national qui a perdu toute légitimité car il a promis à maintes reprises qu’il allait ramener la sécurité, mais ses promesses sont restées lettre morte.
 
J’ai discuté récemment avec un jeune membre d’Ansar al-Charia, un voisin, et il m’a dit qu’il fallait éliminer les policiers et les militaires, et en particulier ceux qui occupaient ces postes quand Kadhafi était au pouvoir. Les intégristes considèrent que tous ceux qui ont servi sous Kadhafi sont des mécréants.
 
 
 
 
 



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