mercredi 9 octobre 2013

AQMI essaime dans tout le Sahara

AQMI essaime dans tout le Sahara

LE MONDE GEO ET POLITIQUE |  •  Isabelle Mandraud
Abdelmalek Droukdal, l'émir d'AQMI.
 AQMI recrute. En quelques mois, l’organisation djihadiste Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) a perdu plusieurs de ses dirigeants. L’un de ses chefs militaires les plus emblématiques, Abou Zeïd, a été tué lors de l’intervention militaire franco-africaine dans le nord du Mali au mois de février. Des centaines d’autres combattants ont péri sous les bombardements. Deux mois auparavant, en décembre 2012, le porte-parole d’AQMI, Salah Gasmi, alias Abou Mohamed Salah, avait été arrêté à Bouira, en Kabylie. Pour compenser ces lourdes pertes, AQMI bat le rappel dans toute l’Afrique du Nord.
Le 12 septembre, l’organisation djihadiste a diffusé sur son site de propagande Al-Andalus une longue vidéo qui prend pour cible, pour la première fois, le roi du Maroc. Le message est explicite : « Au lieu d’émigrer en patera , les jeunes doivent émigrer vers Allah », y déclare Abdelmalek Droukdal, alias Abou Moussab Abdelwadoud, 43 ans, l’émir d’AQMI. Depuis que ce dernier a fait allégeance, en 2006, à Oussama Ben Laden, donnant naissance l’année suivante à Al-Qaida au Maghreb islamique, l’organisation djihadiste d’Afrique du Nord n’a pas cessé d’évoluer, générant à son tour des groupes affiliés.
INTERNATIONALISATION DU MOUVEMENT
Ses racines sont algériennes. Les confrontations régulières avec l’armée ont cependant contraint les fondateurs d’AQMI, tous issus du Groupe islamique armé (GIA) puis du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), à chercher refuge ailleurs. De la Kabylie, où Abdelmalek Droukdal se trouverait toujours, les islamistes radicaux algériens ont ainsi commencé à investir le nord du Mali dès le début des années 2000. Un territoire immense, et stratégique. Dans un document daté du 20 juillet 2012, trouvé à Tombouctou par deux reporters de Libération et RFI et rendu public dans ces deux médias le 6 octobre, Abdelmalek Droukdal décrit l’Azawad (territoire revendiqué par les Touareg) comme le berceau d’un « Etat islamique ». Il donne ses « directives »pour éviter les « excès » qui pourraient nuire à ce projet, comme les « politiques insensées » menées par des groupes – destructions de mausolées, châtiments corporels – responsables du rejet des populations. Il prône les bonnes relations avec les Touareg.
Bien que les principaux dirigeants d’AQMI restent originaires d’Algérie, de nombreuses nationalités ont ainsi peu à peu rejoint l’organisation. Les Mauritaniens, dont l’un, Abderrahmane, alias Thala, membre d’AQMI depuis 2006, vient d’être promu à la tête de la katiba Al-Fourghan, ont été les premiers. C’est par leur entremise, notamment, que les contacts ont été noués avec des médias privés mauritaniens devenus les principaux pourvoyeurs d’informations sur AQMI, qu’il s’agisse des preuves de vie d’otages ou de revendications. C’est par ce biais que Mokhtar Belmokhtar, autre figure « historique » d’AQMI, a revendiqué l’assaut meurtrier, le 16 janvier, contre le site gazier de Tigantourine, dans le Sud algérien, mené par un commando de djihadistes composé de dix nationalités…
SCISSIONS
Les alliances nouées ont favorisé le développement de brigades et l’émergence de nouveaux groupes, au point de créer la confusion. Le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), apparu en 2011, a été présenté comme une scission d’AQMI, et la brigade des Signataires par le sang de Mokhtar Belmokhtar comme une dissidence, avant que ces deux groupes n’annoncent leur fusion dans une entité baptisée Al-Mourabitoune. Malgré les divergences, l’autorité d’AQMI, bien que fragilisée, perdure.
L’organisation djihadiste tente d’élargir son audience. Le terrain s’y prête : l’affaiblissement des Etats après les « printemps arabes » lui offre de nouveaux horizons. Des connexions ont été établies dans le Sud libyen. En Tunisie, un groupe baptisé Oqba Ibn Nafi, implanté sur le mont Chambi, à la frontière avec l’Algérie, aurait fait allégeance à AQMI. Les salafistes tunisiens d’Ansar Al-Charia ne sont pas loin. Sous la direction d’Abou Ayad, ils prônent, comme l’émir d’AQMI, la prédication. Pour commencer.
 http://abonnes.lemonde.fr/international/article/2013/10/09/aqmi-essaime-dans-tout-le-sahara_3492326_3210.html

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