samedi 23 février 2013

Les islamistes maliens ciblent les Touaregs


Les islamistes maliens ciblent les Touaregs

Le Figaro
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Par Thierry OberléMis à jour  | publié  Réactions (3)
Des soldats maliens combattent dans la ville de Gao, jeudi.
Des soldats maliens combattent dans la ville de Gao, jeudi. Crédits photo : FREDERIC LAFARGUE/AFP

Le Mujao reproche aux laïcs du MNLA d'aider l'armée française dans sa traque des djihadistes.

Voici venu le temps des kamikazes au nord du Mali. Un attentat suicide à la voiture piégée remplace l'autre dans la province touareg de l'Azawad. À Gao, les corps de la plupart des djihadistes tués dans le raid de jeudi du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) et retrouvés dans les décombres de l'hôtel de ville portaient à la taille une ceinture d'explosifs.
Vendredi à l'aube, au lendemain d'une attaque menée par le chauffeur d'un véhicule bourré d'explosifs à Kidal à proximité d'un camp de militaires français et tchadiens, deux kamikazes ont visé des rebelles touaregs laïcs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et des civils à Inhalil, près de Tessalit, à la frontière algérienne. Les deux islamistes ont explosé à l'intérieur d'une base du MNLA et trois Touaregs ont été tués sur le coup. L'attentat est attribué au Mujao. Dissidents d'al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), les islamistes armés du Mujao qui contrôlaient la région de Gao ont toujours eu en grippe les membres du MNLA. Mais leur aversion s'est amplifiée depuis que les Touaregs laïcs se sont mis au service de l'armée française. «On voit bien que les groupes terroristes veulent faire payer aux Touaregs leur engagement aux côtés des forces spéciales françaises», commente Hama Ag Sidhamed, un porte-parole du MNLA, qui souhaite «pour aller plus loin dans cette lutte contre les fanatiques», «un soutien logistique» de la France plus conséquent.
Dispersés dans le nord du Mali, les indicateurs du MNLA transmettent des informations sur les déplacements et les caches des islamistes armés. À Ménaka par exemple, près de la frontière du Niger, les notables régionaux liés au MNLA ont signé un texte réaffirmant leur «disponibilité pour lutter contre le terrorisme».
L'expertise des «hommes bleus» est particulièrement utile dans le massif de l'Adrar des Iforas où se sont réfugiés les djihadistes. «Les gens du MNLA ont une connaissance parfaite de cette zone. Il ne faut pas oublier que ce sont d'anciens rebelles qui ont été “locataires” de ces contreforts durant leurs insurrections. Ils font du renseignement géographique pour les Français grâce à leur connaissance des failles, des corridors et des doubles passages. La France se sert de leurs connaissances pour préparer ses interventions», explique Robert Dulas, un spécialiste des questions touaregs. «Les Touaregs fournissent également du renseignement humain car en dehors des membres fondateurs algériens d'Aqmi, un grand nombre de combattants de la mouvance d'al-Qaida sont issus de la région. Ils sont connus et rapidement repérés lorsqu'ils s'éloignent de leurs planques pour se ravitailler», poursuit-il.
Cette collaboration serait à l'origine de divergences au sein du MNLA. Le chef militaire Mohammed Ag Najim qui a longtemps servi le régime de Kadhafi et Bilal Ag Achérif, le chef politique, seraient en désaccord. Le différend porterait plus sur l'organisation du transfert de renseignements aux militaires français que sur son principe. Le MNLA doit aussi faire face à l'arrivée dans ses rangs de déserteurs de l'organisation touareg islamiste Ansar Dine à la fiabilité douteuse.
Reste que les Touaregs ne sont qu'une des cibles des islamistes armés. La mouvance djihadiste, et en particulier le Mujao, qui est plus présent sur le terrain qu'Aqmi ou Ansar Dine, a donné un début de réponse à l'offensive française. Celle-ci se résume à des ripostes via des attaques de guérilla urbaine dont l'objectif est de se frotter aux forces maliennes et françaises, et à des attentats commis par des kamikazes. Il est probable qu'Aqmi et Ansar Dine, qui ont subi de lourdes pertes lors du déclenchement de l'opération Serval, ne soient pas en mesure de s'engager sur une voie identique. Ces deux organisations n'ont pas communiqué depuis leur fuite des grandes villes du Nord.
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