samedi 24 novembre 2012

Le président mauritanien : « Nous ne sommes pas prêts à la guerre » pour le nord du Mali

Le président mauritanien : « Nous ne sommes pas prêts à la guerre » pour le nord du Mali LE MONDE | 24.11.2012 à 11h38 •Isabelle Mandraud Victime, mi-octobre, du tir, « par erreur », d’un officier de son armée sur une route non loin de Nouakchott, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, 56 ans, devait rentrer dans son pays samedi 24 novembre, après quarante et un  jours passés en France, à l’hôpital Percy militaire de Clamart d’abord, puis en convalescence. Affaibli et très amaigri, le chef de l’Etat mauritanien, qui a reçu Le Monde et RFI vendredi à la veille de son départ, dans un grand hôtel parisien, doit faire face à une opposition de plus en plus frondeuse, partisane d’« une transition démocratique » après son absence prolongée. S’y ajoute une situation tendue avec son voisin le Mali, où une intervention internationale est envisagée dans le nord contrôlé par des groupes djihadistes. « Je continue à agir pleinement et à gérer le pays même à plusieurs milliers de kilomètres de distance, assure d’emblée Mohamed Ould Abdel Aziz. Je n’ai plus la même forme qu’avant l’accident, mais j’ai conservé toutes mes facultés physiques et mentales, et c’est moi qui dirige toujours. » Porté au pouvoir par un putsch en 2008 avant d’être élu président en 2009, le chef de l’Etat connaît le penchant de la Mauritanie pour les coups d’Etat en douceur. « Les militaires ont d’autres choses à faire, ils sont conscients de leur rôle maintenant, balaie-t-il. A aucun moment, je n’ai eu de crainte malgré les rumeurs. » Mercredi 21 novembre, plusieurs milliers de personnes réunies à l’initiative de la Coordination de l’opposition démocratique (COD, une dizaine de partis) ont cependant manifesté dans le centre de Nouakchott. « Le pouvoir vit ses derniers moments d’agonie, avait alors lancé l’ancien président Ely Ould Vall. Nous organiserons sans tarder une prière funèbre sur sa dépouille mortelle. » « JE VAIS REPRENDRE MON TRAVAIL » « Je ne vois aucun signe de faiblesse du régime, ironise le président. Je vais reprendre mon travail, sans doute présider un conseil des ministres, et puisque nous sommes à la veille du 28 novembre, il y aura beaucoup d’inaugurations à faire, en particulier deux ou trois centrales énergétiques… » L’opposition, relativise-t-il, « est dans son droit et je l’accepte en tant que telle ». C’est au sujet du Mali, avec lequel la Mauritanie partage 2 400 kilomètres de frontière, que Mohamed Ould Abdel Aziz paraît soudain le moins prolixe, lui qui, il y a quelques mois encore, en avril, assurait que si la communauté internationale et les pays voisins décidaient d’intervenir dans le Nord, « la Mauritanie ferait partie de ce groupe ». Plus rien de tel aujourd’hui. « Le problème n’est pas posé, élude le président, et la demande ne nous a pas été faite. D’ailleurs, cette demande est entre les mains de la Cédéao « . « Vous m’avez connu à une époque où la Mauritanie était attaquée continuellement, ajoute-t-il lorsque l’on insiste. On réagissait, et au besoin, on traversait nos frontières. mais les choses ont changé. (…) Les terroristes nous laissent en paix. La situation au nord du Mali aussi a changé. Il y a maintenant un ou deux mouvements de libération qui réclament l’autonomie, jusqu’à l’indépendance même… C’est pourquoi nous ne conseillons pas qu’il y ait une guerre ouverte avant d’épuiser tous les recours pour essayer de traiter le problème, trouver un terrain d’entente, avant de s’engager dans une guerre qui, à mon sens, pourrait fédérer toutes les forces au nord du Mali, et même toutes les populations contre ceux qu’ils pourraient considérer comme des envahisseurs. »   »JE RECOMMANDE BEAUCOUP DE PRUDENCE » En Mauritanie, l’idée même d’une intervention militaire n’a guère le vent en poupe : « La population ne souhaite effectivement pas. » Plus tard, il affirme : « Nous ne sommes pas prêts à nous engager dans une guerre. » Le président mauritanien ne cache cependant pas sa méfiance envers des groupes armés comme Ansar Eddine, dirigé par le Touareg Iyad ag Ghali, avec lequel des discussions ont été engagées, notamment à Alger et Ouagadougou : « Je ne pourrai pas être d’accord avec des groupes qui ont des accointances avec les terroristes, ni même croire en la fiabilité de ce qu’ils peuvent dire. Je recommande beaucoup de prudence. » Il redoute que « libérer certaines villes du nord du Mali » n’implique que « les terroristes reviennent dans le désert et reprennent leurs activités » par la suite. Cette menace continue de peser aux portes de la Mauritanie. L’enlèvement au Mali, mardi, à 40 kilomètres de la frontière, de Gilberto Rodriguez Leal, 61 ans, un Français qui circulait à bord d’un camping-car en provenance de Mauritanie – ce qui porte à 7 le nombre de Français détenus dans la région – est venu le confirmer. « C’est une zone extrêmement dangereuse et nous déconseillons à tous les touristes de s’y rendre », déclare Mohamed Ould Abdel Aziz. Le même jour, la police mauritanienne a interpellé sur son territoire un autre Français soupçonné de chercher à rejoindre les groupes islamistes armés. Mais pour un d’arrêté, dix ne peuvent-ils pas passer ? « Je ne peux pas vous affirmer le contraire », concède le président. Isabelle Mandraud,http://abonnes.lemonde.fr/international/article/2012/11/24/nous-ne-sommes-pas-prets-a-la-guerre-pour-le-nord-du-mali_1795454_3210.html

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