mardi 24 juillet 2012

Intervention militaire au Mali : troisième échec de la CEDEAO à l’ONU

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Les chefs d'état de la CEDEAO Les chefs d'état de la CEDEAO
Les Nations unies viennent de repousser à nouveau l’éventualité d’une intervention militaire au Mali en privilégiant une solution diplomatique en lieu et place d'une action militaire.

Cette position de l’organisation internationale, qui sonne comme un troisième échec de la CEDEAO et de l’UA, intervient au moment où ces deux organisations régionales sont favorables à une intervention militaire par l'envoi d'au moins 3000 soldats pour affronter les milices armées et les groupes terroristes qui contrôlent le nord du Mali.
Insister sur la priorité du dialogue, tel a été le message de l'ONU, dont le représentant spécial du secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest, Saïd Djinnit, avait énoncé jeudi dernier en ces termes: «Le dialogue est la priorité pour résoudre la crise au Mali», tout en soutenant que «la mise en place d'un gouvernement représentatif est incontournable pour la recherche d'une solution».
Animant une conférence de presse au Palais des Nations à Genève, Djinnit a tenu à rappeler que «l'unité et l'intégrité territoriales du Mali sont menacées par les velléités de sécession de certains groupes et par les agissements de groupes terroristes dans la région».

Pour lui, l'arrivée en grande quantité d'armes en provenance de la Libye constitue également une sérieuse menace et une troisième inquiétude.
Toujours selon lui, «des efforts doivent être fournis pour mettre en place un gouvernement représentatif et devant être déployés pour impliquer les institutions maliennes dans la recherche d'une solution au Mali».

Justement, concernant ce gouvernement inclusif que tous appellent de leurs vœux, le Premier ministre a lancé, la semaine dernière, un appel pour la mise en place d’une commission représentative afin d’amorcer le dialogue entre tous les Maliens. Le Chef du gouvernement avait donné les contours de ce dialogue qui doit inclure sans exclusive les représentants de toutes les forces vives du pays : partis politiques, société civile, notabilités…

Un appel intervenu avant son déplacement au Burkina Faso afin d’exposer son initiative et prendre connaissance de la feuille de route élaborée par la CEDEAO qui s’est éloignée de l’option militaire.
Cela dit, l’intervention militaire souhaitée initialement par la CEDEAO avec le soutien de certains pays voisins du Mali n’est pas évacuée complètement même si le Conseil de sécurité l’a repoussée à trois reprises estimant son premier projet de résolution beaucoup trop imprécis, tout en l’appelant à revoir sa copie.

Il en demeure pas moins que l’organisation ouest-africaine reste toujours campée sur sa position d’envoi de troupes de sécurisation des organes de transition et sur sa menace de représailles contre les séparatistes du MNLA et les autres groupes terroristes afin de rétablir l’ordre constitutionnel et chasser les intrus et libérer le nord du pays.
Malheureusement, une fois de plus, la CEDEAO vient de subir un nouveau revers.

En tout cas, c’est ce qui ressort clairement des déclarations du représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu,  qui a regretté le fait que la CEDEAO, qui demande depuis plusieurs semaines une résolution en faveur d'une intervention au Conseil de sécurité, qui a, à plusieurs reprises, temporisé en demandant plus de précisions à l'organisation,  n’a ni les moyens ni la stratégie pour le déploiement de sa force militaire.
Saïd Djinnit, qui rejoint ainsi le secrétaire d'État adjoint chargé des Questions africaines, Johnnie Carson, estime qu’une telle intervention militaire peut s’avérer une “entreprise très lourde pour la CEDEAO”, qui devrait être “préparée très soigneusement et disposer de ressources en conséquence”.

Par cette manière diplomatique de bloquer l’intervention militaire au Mali, l’ONU ne veut pas supporter une partie des ardoises salées d’un déploiement des milliers de soldats qui vont être engagés dans une aventure dont nul ne sait la fin des opérations.
Car, donnant à sa caution pour un tel déploiement, l’Onu s’engage de facto à soutenir financièrement certaines dépenses que la CEDEAO et l’Union africaine ne peuvent pas seules supporter.

Autres reverses formulées par le représentant spécial de Ban Ki-moon pour écarter, pour l’instant, l’intervention militaire, font référence au revirement et à la tension politique dans certains pays de la sous région considérés comme des puissances régionales.
Si s’agit d’abord du voisin sénégalais qui a pris du recul face de ses troupes au Mali. Ce pays, qui est impliqué fortement dans la crise malienne, a répondu par la négative à l’appel de la CEDEAO d’envoyer ses soldats au Mali.

Son président   Macky Sall, lors de son récent séjour à Paris, a clairement affirmé : "Notre pays a des troupes en Côte d’Ivoire, en République démocratique du Congo (RDC), au Soudan et nous sommes également dans la force en Guinée- Bissau, nous ne pouvons pas être au Mali (...) Nous sommes déjà sur tous les fronts et avons du mal à couvrir".

Alors que le Sénégal a décliné l’offre, le Nigeria, premier fournisseur en hommes pour cette force, souffre lui aussi de deux handicaps majeurs. Les critiques sévères sur le comportement de ses soldats opérant dans les contingents de l’UA et la situation interne du pays ne permettent pas la mobilisation d’autres éléments. En effet, le nombre d’attentats commis par la secte intégriste Boko Haram, le groupe terroriste nigérian, a sensiblement augmenté cette année obligeant les autorités à prendre des mesures supplémentaires pour y faire face.

Raison pour laquelle l’ONU a demandé, dans le sillage de son rejet de résolution réclamée par la CEDEAO avec le soutien de puissances occidentales, notamment la France, “des précisions supplémentaires sur les objectifs et conditions d’une éventuelle opération armée”.
Tout plaide alors pour la solution politique, comme soutenu par l’Algérie avec les pays du champ ainsi que l’Union africaine que la résolution du Sommet des chefs d’État a largement appuyée.

Il reste cependant à Bamako d’agir dans le sens envisagé et d’entamer le dialogue avec “toutes les parties maliennes” pour sortir de cette crise qui menace de déborder sur les pays voisins.
Par Mohamed D. DIAWARA
Source: Info Matin

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