mardi 1 mai 2012


Lundi 30 avril 2012

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Depuis plusieurs jours, le monde semble découvrir l’existence d’un peuple jusqu’ici plutôt discret, celui des touaregs.

Appelés Kel Tamasheq - « Ceux qui parlent le tamasheq »- ou encore les hommes bleus (à cause de leur turban teint à l’indigo qui finit par déteindre sur la peau), les Touaregs sont un peuple de quelques 2 millions d’habitants, éclatés entre cinq pays (le Niger, le Mali, le Burkina Faso, l’Algérie et la Lybie).

Au nord, le pays Touareg est en contact avec le domaine méditerranéen et pénètre le sahel au sud. Ce peuple est en quelque sorte le pont entre le Maghreb et l’Afrique noire.

Bien qu’éclatés entre différents pays, les Touaregs ont quelques particularités communes : d’abord la culture touarègue, homogène. Ensuite le fait qu’ils habitent toujours dans les zones les plus arides et les plus difficiles d’accès, souvent loin des capitales politiques. Bien que nomades, beaucoup de Touaregs se sont sédentarisés en s’installant autour de grandes villes comme Agadez au Niger ou Tamanrasset en Algérie ou encore Kidal au Mali.

Descendants des premiers habitants d’Afrique du nord, les Touaregs sont des berbères qui disposent d’une écriture le Tifinagh et ont en commun la même base linguistique le Tamasheq.

Ils partagent avec les Maures certaines coutumes comme la cérémonie des trois thé, symbole d’hospitalité. Dernier peuple d’Afrique de l’ouest à être soumis par le colon français, les Touaregs vont être éclatés entre plusieurs pays à l’Indépendance de ceux-ci.

Souvent ignorés par les nouveaux maîtres des lieux, ils apprennent pourtant à s’intégrer dans ces nations nouvelles tout en revendiquant leur spécificité culturelle. L’organisation sociale des Touaregs est assez rigide, chaque touareg devant rester à la place qui est la sienne : nobles (inzajeghen), tributaires (imghad), religieux (ineslemen), serfs ou anciens serfs (iklan ou bella selon la terminologie songhay).

Cependant, « Les Touareg maliens ne peuvent être coulés dans un même moule. Par leur histoire, par leurs migrations anciennes, par leurs implantations actuelles, ils se distinguent les uns des autres. Leur économie, qu’elle soit exclusivement pastorale, pastorale et caravanière, ou encore agro-pastorale, varie en fonction de la région où ils vivent.

Appartenant à une même civilisation, les Touareg occupent au Mali un espace qui va de la zone saharienne à la zone soudanienne, ils forment un pont qui relie l’Algérie et le Burkina Faso. Le « pays touareg » malien, à l’extrême nord-est, est si éloigné de la capitale, que Niamey est son débouché naturel, en cas de crise, beaucoup plus que Bamako [i] ». En effet, les kel Adar (installés autour de Kidal) sont en lien constant avec leurs cousins du nord (Algérie) tandis que les Iwellemmeden kel Ataram, « ceux de l’ouest » (chef-lieu Manaka) sont plutôt liés à leurs frères du Niger, les Iwellemmeden kel Denneg, « ceux de l’est ».

Autour de Tombouctou, les Touareg kel Antesar et Tenguereguif disposent de titres fonciers sur des terres riches et sont souvent en concurrence avec les autres groupes ethniques (paysans songhaï, Peuls). Dans le Gourma et à la frontière du Burkina Faso, les Touaregs s’adonnent à la cueillette et à l’élevage intensif. Il semble donc que les Touaregs sédentarisés se soient adaptés économiquement selon les dispositions naturelles des lieux.

Au Mali, les Touareg ont toujours résisté face à ceux qui voulaient leur imposer un État central.

D’abord contre le colonisateur français, ensuite à partir de 1964 contre l’Etat malien. Ce sont les Kel Adar (région de Kidal) qui se lèvent contre le nouvel État malien en 1964 alors qu’ils avaient été plutôt discret lorsque les Kel Ataram résistaient contre l’envahisseur français (ils perdirent beaucoup de guerriers dans cette résistance). La révolte des Kel Adar durera un an et demi et la répression de l’État malien fut terrible.

A cause de la sécheresse de 1972 et 1973, beaucoup de Touaregs du Mali émigrent vers les pays voisins ( Niger, Algérie). Si certains Touaregs maliens installés à Niamey sont rapatriés par camions dès 1974, ceux installés en Algérie ( à Tamanrasset) y restent pour profiter de la richesse de la région ( grâce au pétrole). En 1990, un incident né au Niger enflamme de nouveau le pays Touareg.

Le pays touareg malien entre alors en révolte et la réponse de l’État malien est de nouveau très violente. Fusillades des rebelles, accusation de massacres de femmes et d’enfants touaregs par l’armée malienne (qu’elle dément), cette nouvelle rébellion marque une nouvelle fracture entre le peuple Touareg et l’État malien.

Pourtant, la population malienne, sous la dictature de Moussa Traoré, est plutôt sympathisante de cette révolte des Touaregs au nord du pays. A la chute du dictateur, les heurts entre l’État malien et les touaregs ne s’arrêtent pourtant pas. La blessure ouverte lors de la rébellion de 1990 est difficile à soigner.

Les événements en Libye lors de la chute de Kadhafi donneront l’occasion aux Touaregs du MNLA (Mouvement Nationale pour la Libération de l’Azawad ) surarmés de s’emparer d’une bonne partie du nord du Mali avant de décréter l’Indépendance du pays Touareg.

Moulzo

[i] Edmond Bernus, ORSTOM

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