mercredi 25 avril 2012


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EL Watan/Algerie
 

Abdelkrim Ag Tayyeb. Chef des cinq régions de l’Azawad

«Il n’est pas question pour le moment d’ouvrir un nouveau front avec Al Qaîda»

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le 25.04.12 | 10h00 Réagissez

Notre région n’a aucun problème avec la religion, et personne ne pourra être contre la charia.» C’est ce qu’affirme Abdelkrim Ag Tayyeb, responsable des cinq régions que compte l’Azawad. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il affirme que les groupes d’Al Qaîda «ne sont pas aussi importants sur le terrain.» Selon lui, ils ont profité «d’un vide» auquel le congrès va devoir apporter des réponses…

-Vous êtes responsable des cinq régions qui l’Azawad. Peut-on connaître les dernières nouvelles sur les sept otages algériens détenus depuis plus de trois semaines par Al Qaîda sur votre territoire ?
Il est vrai que des négociations pour leur libération se poursuivent et que les contacts avec les ravisseurs sont toujours en cours. Je ne peux en dire plus, sauf que nous croyons à une libération rapide. C’est une question de temps seulement.
Aujourd’hui, Gao abrite un congrès de trois jours. Pouvons-nous en savoir plus sur les participants et son ordre du jour ?
Ce congrès est décisif pour le MNLA. Plusieurs centaines de personnes entre chefs de tribu, notables, personnalités politiques et cadres du mouvement y sont conviés pour permettre à toutes les composantes de la société de l’Azawad de prendre part à la destinée de notre pays. Ce sera l’occasion d’assainir la situation interne du mouvement et de régler les divergences internes et externes qui minent pour l’instant le MNLA. Les solutions à ces problèmes seront, de ce fait, décidées d’une manière consensuelle et non unilatérale.
-Pour l’instant, le plus grand problème est lié à la présence des groupes de djihadistes sur le territoire de l’Azawad. Quelle position allez-vous adopter par rapport à leurs activités ?
Ce point précis sera discuté au sein du congrès. Un message très clair sera adressé à ces groupes afin qu’ils cessent toute activité qui nuit à la sécurité et à la souveraineté de l’Azawad. Nous allons procéder dans un premier temps d’une manière diplomatique, et dans le cas où ils n’obtempèrent pas à nos demandes, nous prendrons les mesures qu’il faut. Nous avons fait exprès d’impliquer tous les chefs de tribu et les notables afin de les sensibiliser sur la nécessité de faire en sorte que leurs enfants ne soient plus mêlés à ces groupes. Ces groupes ne sont pas aussi importants que la presse le prétend. Ils ont juste profité d’une situation de vide pour intensifier leurs actions, et à laquelle le congrès va trouver une solution. C’est vrai qu’aujourd’hui ils sont partout sur le territoire, mais nous avons les capacités de les contenir avec l’aide de la population. C’est pour cette raison que nous avons réuni toutes les notabilités et les personnalités influentes de la région.
-Pensez-vous être en mesure de contenir également Ançar Eddine, lui qui ne reconnaît pas l’indépendance de l’Azawad et qui veut plutôt instaurer la charia ?
Nous n’avons aucun problème avec la religion. Si demain le peuple de l’Azawad veut la charia, personne ne l’empêchera. Nous sommes tous des musulmans. Le fait d’instaurer la charia ne nous fait pas peur. Je ne pense pas que Iyad et son groupe Ançar Eddine puissent se mettre à l’écart du combat du MNLA pour l’indépendance de l’Azawad. Ils travaillent en étroite collaboration avec le mouvement. Leur combat est le même. De plus, il ne représente pas la majorité au sein de la société. Aujourd’hui, notre principale préoccupation vient plutôt des extrémistes.
-Comme Al Qaîda ?
Oui, Al Qaîda et Boko Haram constituent une vraie préoccupation pour nous, même si nous savons que sur le terrain, ils n’ont aucun poids. Nous ferons tout pour que les composantes influentes de l’Azawad prennent leur responsabilité et diffusent le message que nous allons adresser à ces organisations.
-Pensez-vous qu’elles accepteront de quitter un territoire qu’elles ont acquis ?
Nous ferons tout pour qu’elles comprennent qu’elles ne peuvent plus agir comme elles le faisaient avant. Il y a une nouvelle situation qu’elles doivent respecter. Dans le cas où elles refuseraient, nous prendrons d’autres mesures.
-Lesquelles ?
Je ne sais pas, mais cette éventualité a été prise en compte. Pour l’instant, il n’est pas question d’ouvrir un nouveau front avec Al Qaîda. Nous ne sommes pas prêts à une quelconque confrontation, mais nous allons trouver des solutions plus diplomatiques.
-Le tout nouveau Premier ministre malien a appelé, jeudi dernier, les groupes qui occupent le Nord à négocier. Quelle a été votre réponse ?
Nous sommes tous pour le dialogue. Il y a eu des contacts entre nos représentants et des responsables maliens à Nouakchott avec une médiation mauritanienne. Mais cela n’a servi à rien, tout simplement parce qu’à Bamako, les choses ne sont pas encore claires et la situation est très instable. Avec qui allons-nous discuter ? Avec une junte qui ne contrôle rien ? Avec un Premier ministre qui ne gère que la transition ? Je pense qu’il est prématuré de parler de dialogue. Nous discuterons le jour où la situation sera moins confuse à Bamako.
-Jusqu’à maintenant, ni le Mali ni la communauté internationale et encore moins les pays voisins n’ont accepté la partition du Mali. Allez-vous revoir votre position par rapport à cette question ?
Cette question sera tranchée par le congrès. Mais sachez que la majorité écrasante des participants à ce congrès n’est prête à revenir sur l’indépendance. Il s’agit d’un principe que rares sont ceux qui acceptent de le discuter. Néanmoins, nous laissons les portes du dialogue ouvertes. Nous voulons que les négociations aient lieu sur un terrain neutre, ailleurs qu’au Mali et sous la supervision de pays qui ont de l’influence sur la région. Nous ne voulons plus rééditer les accords signés à l’issue des rebellions des années 1960, 1990 et 2000.
 
Salima Tlemçani

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