dimanche 24 janvier 2010

Hommage a Lhasa de Sela :artiste d'exception




AFP/ATTILA KISBENEDEK
Lhasa de Sela est morte à son domicile de Montréal le 1er janvier peu avant minuit.
Objet d'une affection particulière des milieux musicaux et des fans, fraternelle et nomade, la chanteuse américano-mexicaine Lhasa de Sela est morte, le 1er janvier, à son domicile de Montréal, des suites d'un cancer du sein. Elle était âgée de 37 ans.

Le Monde.frLa chanteuse Lhasa est morte
Née le 27 septembre 1972 à Big Indian, dans l'Etat de New York, Lhasa tenait son prénom de sa mère, américaine, en référence à la capitale du Tibet, et son nom, ainsi que la langue espagnole dans laquelle elle chantait, de son père mexicain. Ainsi Lhasa réconciliait-elle le bouddhisme du Toit du monde et les catéchumènes du Yucatan. Venue à la musique par le Québec, où elle s'était installée, elle conquit Montréal avec La Llorona, paru en 1997, ce qui lui permit de venir représenter le Québec au Printemps de Bourges la même année, section Découvertes, puis d'intégrer le label français Tôt ou Tard.

Cette enfant de la balle (une vie itinérante, neuf frères et soeurs, dont une soeur trapéziste, une autre funambule, une troisième acrobate de cirque) qui chantait dans les bars de San Francisco à l'âge de 13 ans, avait conquis les coeurs avec un album latin, aux sonorités quelque peu âpres, réalisé avec le guitariste québécois Yves Desrosiers, et riche de chansons incontournables, tel El Desierto, un tube rude comme une pomme de terre gelée, sombre et enluminé comme la cathédrale de Mexico. Elle y reprenait La Llorona (la "pleureuse", inspirée de Cihuacoalt, l'épouse de Quetzalcoatl, le Serpent à plumes des Aztèques), chanson traditionnelle mexicaine rendue célèbre par l'égérie mexicaine de Pedro Almodovar, Chavela Vargas.

Là où Vargas, et toute une dynastie de chanteuses mexicaines, pleurait le coeur dans la gorge, Lhasa ajoutait de la country, une certaine dose d'hystérie rock, et développait une voix peu commune, barrée par la respiration et des cassures volontaires. Derrière cet édifice touchant parce que fragile, Yves Desrosiers, ex-comparse du rocker québécois Jean Leloup, avait placé un tamis de banjo, de caisses claires, d'accordéon, de scie musicale, guitare hawaïenne, violoncelle, placé à la manière klezmer ou pan-bulgare.

Les textes de Lhasa, écrits en espagnol, avaient du nerf, de la graine de passion. Après le succès de La Llorona, elle s'était installée à Marseille pendant plus de deux ans pour préparer son deuxième album, The Living Road, lancé à Montréal en 2003, interprété cette fois en espagnol, en français et en anglais, et toujours teinté de ses origines bigarrées - du gospel à la ranchera.

En 2009, était paru un troisième album, Lhasa, pour lequel une tournée européenne était prévue à l'automne 2009. Mais, en raison de problèmes de santé, elle avait dû l'interrompre en mai après deux concerts en Islande et après avoir présenté son nouvel album au Théâtre Corona, à Montréal, et aux Bouffes du Nord, à Paris. Elle travaillait à un quatrième disque où elle voulait interpréter des chansons des Chiliens Victor Jara et Violeta Parra.

Lhasa avait notamment collaboré avec des artistes tels qu'Arthur H, Patrick Watson et les Tindersticks. En 2005, elle avait été sacrée meilleure artiste des Amériques aux Awards for World Music de la BBC. La Llorona, The Living Road et Lhasa se sont vendus à plus d'un million d'exemplaires à travers le monde.



Véronique Mortaigne

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