mardi 8 décembre 2009

Afrique, comment ça va avec l’extraction d’uranium ?


Samuel Gontier-Télérama-07-12-09
Afrique, comment ça va avec l’extraction d’uranium ?
lundi 7 décembre 2009

Enquête salutaire au Niger et au Gabon où le travail dans les mines fait des victimes. Sans bruit. Un document qui fait froid dans le dos, diffusé ce lundi à 18h et 22h30 sur Public Sénat.

Dominique Hennequin correspond assez peu à l’image que l’on se fait du grand reporter baroudeur. Bien mis, très discret, voix posée… Pourtant, il a beaucoup voyagé, notamment pour Envoyé spécial. Cette fois, pour Public Sénat, il a pénétré avec Pascal Lorent un des lieux les plus secrets du monde, les mines d’uranium exploitées par Areva à Arlit, au Niger.

« Notre visite était tellement encadrée, elle m’a rappelé la Corée du Nord », témoigne l’auteur des Deux Corées. Les enquêteurs ont bénéficié d’une opération de communication de la multinationale du nucléaire. Trois jours d’une visite très guidée pour promouvoir les Observatoires de la santé, structures mises en place avec Médecins du monde suite aux revendications d’anciens salariés français relayées par l’ONG Sherpa.

Car l’extraction du minerai tue. A petit feu. Sournoisement, la pollution engendrée étant inodore, invisible. Et pas seulement à Arlit mais aussi à Mounana, au Gabon, où se déroule la première partie de l’enquête autour des mines fermées en 1999 et des populations abandonnées sur un territoire contaminé. Au Niger, les auteurs ont réussi à rencontrer clandestinement le responsable d’une ONG locale. Et à prouver l’ampleur du danger avec les ingénieurs de la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité) – « Il fallait une expertise scientifique pour être inattaquables. » Ils sont même passés par l’Algérie pour rencontrer des rebelles touareg exaspérés de voir leurs terres spoliées et polluées.

Alors, enquête à charge ? Certainement. Pourtant, avec le même calme qui donne sa crédibilité à l’enquête, Dominique Hennequin se défend de tout procès d’intention. « Je ne suis pas contre le nucléaire, j’en utilise tous les jours. Mais comment ne pas être indigné par le sort de ces gens qui meurent en silence, dans la souffrance ? »

Le déni – à Arlit, il n’y aurait pas eu un seul cas de cancer en quarante ans ! – et la langue de bois opposés par les responsables d’Areva – « On ne connaît aucune victime cachée », s’emmêle toutefois l’un deux – en deviennent indécents. Ils ne parviennent pas à masquer l’inanité du discours convenu, selon lequel le nucléaire est une énergie propre qui assure notre indépendance énergétique. Exploitation d’un pays pauvre, guerre, pollution… l’uranium n’a rien à envier au pétrole, comme le prouve cet excellent reportage, fruit de deux ans d’enquête.

Samuel Gontier

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Le site de la CRIIRAD

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