samedi 4 juillet 2009

INTERPELLATION DE MAHAMADOU ISSOUFOU: Signe d’irritation du régime Tandja...

Écrit par Ibrahim Elhadj dit Hima (Roue de l’Histoire n° 463 du 1er Juillet 2009)
Vendredi, 03 Juillet 2009 13:59


C’était hier mardi 30 juin dernier que le chef de file de l’opposition FDD a été interpellé par les services de la gendarmerie nationale. C’était aux environs de 20h30. L’information s’est très vite répandue dans les rues de la capitale comme une traînée de poudre. Spontanément, les artères du quartier plateau, le quartier des ministères qui abrite aussi les bureaux de la gendarmerie et le palais présidentiel, ont été littéralement envahies par une foule de militants venus en voitures ou à pieds même des quartiers éloignés de la capitale. La tension était vive sur la place, les militants qui ont voulu marquer leur soutien à Mahamadou Issoufou, président du parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS), un parti de l’opposition membre du FDD front pour la défense de la démocratie opposé au projet de référendum de Tandja, côtoyaient les éléments de force de défense et de sécurité farouchement armés. L’interpellation de Mahamadou Issoufou faisait suite à une déclaration rendue publique le samedi 27 juin dernier, déclaration dans laquelle le front FDD a notamment appelé les forces de défense et de sécurité à ne pas obéir à tout ordre manifestement illégal.

Allusion à toute mesure émanant de Tandja Mamadou que le front FDD a dit ne plus considérer comme président de la République depuis qu’il a prononcé la dissolution de la Cour Constitutionnelle, le vendredi 26 juin dernier, opérant ainsi un acte grave de coup d’Etat comme l’a indiqué la déclaration du FDD du samedi 27 juin. Le leader du front FDD est resté pendant près de deux heures qu’a duré son audition à la gendarmerie avant d’être relâché. Tout autour des locaux de la gendarmerie, des slogans de soutien à la lutte du FDD fusaient des foules, mêlés à d’autres slogans hostiles à l’endroit de Tandja Mamadou et du Ministre d’Etat Albadé Abouba. Le tout sous le regard impuissant des éléments des forces de l’ordre qui tenaient nerveusement à empêcher tout débordement.

A sa sortie de la gendarmerie, c’est sous des houra de victoire que la foule des militants a accompagné le président du PNDS Issoufou Mamadou jusqu’à son domicile. Le chef de file de l’opposition s’est brièvement exprimé sur les motifs de son interpellation avant de se retrancher dans ses locaux, accompagné par les autres responsables du Front FDD. Rien n’a été retenu contre moi, a indiqué le président du PNDS Mahamadou Issoufou. «J’ai été interpellé par la gendarmerie par rapport à la déclaration que le FDD a rendu publique le samedi dernier sur le point de la déclaration relatif à l’appel que nous avons eu à lancer aux forces de défense et de sécurité de ne pas obéir, conformément à l’article 13 de la constitution à tout ordre manifestement illégal.

Egalement, nous avons rappelé les différents arrêts de la cour constitutionnelle dans cette déclaration et en particulier les dispositions de l’article 115 qui stipule que les arrêts de la cour constitutionnelle sont sans recours. Et ces arrêts là lient toutes les autorités administratives, civiles, militaires et juridictionnelles. C’est sur ces différents points que la question m’a été posée par la gendarmerie. J’ai clairement dit à la gendarmerie que notre combat est un combat démocratique, que notre combat s’inscrit dans la légalité républicaine… », a déclaré Mahamadou Issoufou à sa sortie de la gendarmerie. Il faut rappeler que la veille de l’interpellation de Mahamadou Issoufou, le lundi 29 juin dernier, c’est le porte parole du FDD Marou Amadou qui a été interpellé et gardé dans les locaux de la police judiciaire.

Les contours de toutes ces vagues d’interpellation restent les mêmes, elles sont directement associés à la dernière déclaration du FDD du samedi 27 juin. Déclaration qui, visiblement a fait monter d’un cran la tension d’opposition entre le camp de Tandja Mamadou dans sa logique de maintien du projet de référendum et les acteurs du front de l’opposition fermement engagés à faire barrage au projet référendaire de Tandja Mamadou. Sortie du FDD n’a surtout pas été très tendre avec Tandja Mamadou. Les responsables du front l’ont déshabillé de son statut du Président de la République. Tandja Mamadou, en refusant de se plier aux arrêts de la cour constitutionnelle, s’est mis en porte à faux avec la constitution du 09 août 1999.

C’est alors que l’opinion nationale et internationale attendait une position de retour à la normalité que Tandja Mamadou faisant suite à une déclaration du Ministre d’Etat Albadé Abouba sur la poursuite du projet de référendum lors d’un point de presse va annoncer la dissolution de la cour constitutionnelle et le recours à des mesures exceptionnelles contenues dans l’article 53 de la constitution. L’irritation était clairement perceptible dans les dispositifs politiques mis en oeuvre le lundi 29 juin dernier surtout après que la cour constitutionnelle le même jour rendait un autre arrêt pour déclarer irrecevable la requête de Tandja Mamadou lui demandant de déclarer l’inexistence de son arrêt du 12 juin dernier qui annulé le décret portant convocation du corps électoral pour le référendum du 4 août prochain.

Du côté du front de l’opposition, les choses sont désormais claires, Tandja Mamadou n’est plus président de la République. Et dans la suite de sa déclaration du samedi 27 juin, Issoufou Mahamadou parlait plutôt de «M. Tandja Mamadou». M. Tandja Mamadou, l’évocation du coup d’Etat contre la constitution et la violation de son serment par Tandja Mamadou, tout cela a fini par ébranler la sérénité jusquelà affichée dans le camp de la maison Tandja Mamadou. Depuis lundi dernier en effet, avec le recours par Tandja Mamadou à l’article 53 de la constitution sur les mesures exceptionnelles, la crise politique s’est quelque peu approfondie. La situation risque encore de se crisper davantage.

Avec le recours à l’article 53 par Tandja Mamadou et le tripatouillage consistant à suspendre certaines dispositions de la constitution, le pays risque de plonger sous un régime d’exception avec en face une opposition qui rejettera systématiquement toute mesure prise par le pouvoir politique en place qui ne disposerait plus d’une habilitation légale, comme l’a indiqué en substance la déclaration du FDD. Le samedi 27 juin dernier déjà, le chef de file du front FDD a annoncé qu’ils ne reconnaissent pas la décision de Tandja Mamadou portant dissolution de la cour constitutionnelle. Pour Mahamadou Issoufou du FDD, la cour constitutionnelle présidée par Mme Fatoumata Salifou Bazèye reste la seule institution qu’ils reconnaissent.
Cette position constituera un autre fermant de conflits sérieux à un moment où Tandja Mamadou s’apprête à désigner les nouveaux membres de la cour constitutionnelle réformée par un décret en date du lundi 29 juin dernier.

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